Inscrire la neutralité du Net dans la Constitution
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01.03.2019 - 18.407
Étape:Propositions nationales
État du conseil:Liquidé
Conformément à l’article 160 alinéa 1 de la Constitution et à l’article 107 de la loi sur le Parlement, je dépose l’initiative parlementaire suivante:
La Constitution est modifiée, afin de garantir que la loi garantisse l’accès libre, universel, égalitaire et non discriminatoire à tous les réseaux numériques ouverts.
Développement:
Le concept de neutralité du Net signifie que les opérateurs de télécommunications doivent permettre l’accès à tous les contenus et applications, quelle que soit leur source, sans favoriser ou bloquer certains produits ou sites Web.
Les données Internet circulent entre le centre de données de l’émetteur jusqu’au smartphone ou à l’ordinateur de l’utilisateur grâce à une infrastructure de câbles et de fibres d’un opérateur de télécommunications. Chaque internaute paie donc à un opérateur de télécommunications une certaine somme pour utiliser son infrastructure et ainsi accéder à Internet. Après ce paiement, l’opérateur n’est plus censé contrôler le contenu des données qui circulent, leur source, leur destination ou encore leur nature.
Le principe de neutralité du Net garantit donc aux internautes un accès égalitaire et sans aucune discrimination à tout type de contenu diffusé sur le Web que ce soient des articles, des vidéos, des photos ou encore des applications.
Absence de neutralité du Net est synonyme de libre arbitre pour les opérateurs de télécommunications. En effet, si on fait abstraction de ce principe, rien n’empêche les opérateurs d’exiger une contrepartie financière pour permettre un accès libre et rapide aux contenus proposés sur Internet par une entreprise. Soit l’utilisateur paie pour y accéder, soit l’entreprise paie pour que tous les internautes puissent avoir accès à ses contenus. Dans les deux cas, l’opérateur fait preuve d’une attitude arbitraire et discriminatoire, fausse la concurrence et limite le droit à l’information (art. 16 al. 3 de la Constitution fédérale), dans le seul but d’augmenter son profit. L’opérateur pourrait également proposer un forfait Internet incluant un nombre limité d’applications ou de sites préalablement choisis, à l’image de ce qui se passe avec les forfaits télé où l’utilisateur paie plus s’il veut avoir accès à plus de chaînes. Les contenus des entreprises dont les applications ou sites ne seraient pas choisis par les opérateurs seraient donc beaucoup plus difficiles à afficher par l’internaute, ce qui constituerait, à nouveau, une distorsion manifeste de la libre concurrence et une limitation de l’accès à l’information.
En Suisse, la neutralité du Net est une « règle non écrite ». Or, sans législation claire et précise sur le sujet – même la loi sur les télécommunications (LTC) ne fait aucune référence au principe de la neutralité du Net -, les internautes ne sont pas à l’abri d’abus et ce n’est pas le code de conduite adopté par les opérateurs qui va les rassurer, étant donné que celui-ci n’est ni contraignant ni complet.
Nous avons donc le devoir d’anticiper, protégeant les consommateurs et les entreprises du libre arbitre des opérateurs, en inscrivant ce principe de neutralité du Net dans la Constitution fédérale. En tant que corollaire de la liberté d’expression et du droit à l’information, d’une part, et de la liberté de concurrence, d’autre part, la neutralité du Net mérite d’être considérée comme un droit fondamental constitutionnellement garanti.
Il conviendra évidemment de prévoir des exceptions légales pour les services d’urgence qui peuvent justifier des entraves à la neutralité du Net en cas d’intérêt public marqué.